Je ne raconte pas tout ici. Je n’en parle que si cela fait sens dans la grande histoire.
J’ai cette conviction chevillée au corps que beaucoup de nos petites histoires racontent une histoire plus grande, celle de notre vie et du chemin qu’on suit l’air de rien. Ces petites histoires, peu importe la façon dont elles se terminent, en bien, en mal, en rien, elles ont une forme d’importance qui n’est pas proportionnée à leur durée. Un mec d’une nuit peut nous apporter bien plus qu’une histoire de deux ans. Ce sont des passages qui emmènent quelque part, où, on ne sait pas encore. On le saura à la toute fin, mais ce sont elles qui font de notre vie une histoire en continu qui avance, encore et encore.
Après deux ans avec un mec qui clamait ses grands dieux ne pas être amoureux de moi, à qui je plaisais pas assez, je me demandais si c’était encore possible qu’on puisse me trouver chouette et craquer un peu. Face à ça, j’avais fini par verrouiller mon cœur, moi l’amoureuse chronique qui trouve des crushs (consentants, hein) dans les ténèbres d’une rave et qui adore se laisser porter par cette magie-là. Tant et si bien que le quitter avait été une libération, mon cœur méritait mieux que ça. Il méritait de s’emballer encore. Après tout, la grande histoire n’était pas terminée.
Alors, au beau milieu de cet hiver, quand il faisait froid et gris, je n’ai rien trouvé de mieux à faire que d’avoir un sacré crush sur un type rencontré dans un bar. Motif : j’avais adoré son sourire. On a échangé un regard, il m’a dit un truc sans importance, et il a allumé une petite étincelle de joie au fond de moi. Tiens, coucou toi ! Ça faisait longtemps !
Je lui ai dit qu’il avait un sourire à mourir et ça a eu l’air de le surprendre. J’ai foncé, il ne s’est pas débattu longtemps. Entre lui et moi, il y a eu comme un petit feu de joie, des petites flammes qui ont dansé au rythme de la musique l’espace d’une soirée. On se connaissait à peine, mais c’était comme si c’était parfaitement normal d’être là à s’embrasser, dans cette bulle de connerie qu’on s’était créée l’espace de quelques heures. Il m’a dit : « on s’aime vraiment bien, toi et moi, non ? ». Oui, on s’aimait bien.
A la fin, un peu sonnés, on s’est regardés en se demandant ce qu’il s’était passé au juste :
« un coup de cœur, je crois.
- Ah ? et bah je m’attendais pas à ça »
Malheureusement, il n’était pas libre, alors j’ai remisé ces moments partagés dans un coin de mon cerveau, et c’était un endroit très doux, où j’aimais bien retourner.
Comme la vie est farceuse et que je sors beaucoup, je suis retombée sur lui par hasard au beau milieu d’une foule de club. Les distances n’ont pas duré, et le feu de joie et de connerie est reparti, pouf, comme ça, sans vraiment avoir besoin de souffler sur les braises. C’était reparti pour une soirée dans cette bulle hors du temps et de l’espace. Ce garçon, il me chamboule. J’adore jusqu’à sa façon de tourner ses messages, avec plein de virgules.
Moi, les virgules, ça m’émeut.
J’ai quand même demandé à la pote qui m’accompagnait si j’étais dingue, si j’avais basculé dans l’érotomanie la plus complète : « Non, non je t’assure, vous vous attirez comme deux aimants ».
Cette petite histoire, c’était quand même une sacré tuile. Alors, le lendemain j’étais dans une sacré en détresse en pensant à ce guêpier.
Le truc c’est que j’ai décidé il y a déjà plusieurs mois que je m’aimais trop pour me mettre dans des situations qui allaient me faire souffrir. Plus jamais. La vie est trop courte pour se morfondre, trop courte pour perdre son temps avec un mec qui n’est pas all-in.
Alors j’ai fini par lui écrire le récit de notre histoire, pour lui raconter la magie de ces soirées, avec plein de virgules. Mais j’allais me débrouiller pour tirer un trait, je trouverais bien une méthode, un truc, une échappatoire. Je me débrouille toujours. Après tout, j’en ai vu d’autres.
C’est pénible les crushs, c’est toujours les plus durs à oublier. Une rupture, c’est pas si compliqué, c’est facile d’être en colère contre son ex – les hétéros ont assez de défauts pour ça – on peut le détester, faire plein de blagues sur lui, comprendre pourquoi ça n’a pas marché, et pouf, on fait le deuil et l’autre n’est qu’un lointain souvenir, parfois tendre, mais très souvent désagréable.
Mais quelqu’un qu’on connait à peine et qu’on ne voit encore qu’avec des lunettes qui rendent tout plus joli et tout merveilleux ? Quelqu’un qu’on n’a pas connu au quotidien, quelqu’un qui ne nous a pas blessé ? Quelqu’un qui nous a juste faire ressentir des trucs cools ? Quelqu’un qui nous a juste fait taper le cœur un peu plus fort, en montrant que la magie c’était toujours possible ?
C’est pas une mince affaire d’y renoncer. Car, comment renoncer à l’espoir, en vrai ?
Ma première méthode aura donc été d’appliquer mon satané principe d’honnêteté. Je lui ai dit et écrit tout ce que je pensais de lui. Comme ça, dire mes sentiments, parler de mes émotions, ne rien garder pour moi. Débrouille-toi avec ça, ça t’apprendra à être toi ! Ça t’apprendra à utiliser tes foutues virgules !
Puis cette histoire, je l’ai racontée. J’ai usé et abusé de la patience de mes amis. Ils ont hoché la tête, fait « oui oui, je comprends », m’ont payé des shots et trainé dans d’autres soirées.
J’ai voulu mettre le récit à distance, en faire un souvenir. Je l’ai rangé dans un nouveau coin de mon cerveau, c’est toujours aussi doux, mais c’est dans une boîte que je ne dois pas ouvrir. C’est la boîte à souvenir des jolies histoires qui n’auront pas lieu, il y a tout un bordel dedans. Mais ces histoires, elles ont toutes un sens dans la grande histoire.
Je suis encore capable de m’emballer, je peux toujours me faire chambouler par un sourire, et, ça, putain, c’est la chose la plus merveilleuse du monde.
Après tout ça, je me suis dit qu’il fallait que je m’occupe avec des activités qui me faisaient vraiment plaisir. Je voulais faire quelque chose qui allait me prendre du temps, m’empêcher d’y penser, me permettre de créer de nouveaux souvenirs, rencontrer de nouvelles personnes, créer de nouveaux liens, faire du bien à mon corps et à mon esprit.
J’ai nommé : la chope.
Comme c’est toujours le loisir qui me fera le plus rire, j’ai ouvert grand les vannes de la déconne et de l’exploration. Je ne suis pas du genre à me laisser abattre. On en reparle aux prochaines newsletters !
A suivre...