Est-ce que j’aurais dû partir quand il m’a dit quand j’étais en plein deuil de mon père : « Vivement que ça aille mieux car c’est compliqué en ce moment. » ? Certainement, mais je n’en avais juste pas la force.
Est-ce que j’aurais dû partir quand il m’a longuement expliqué que j’étais « ridicule à m’arrêter aux feux rouges à vélo à Paris » ? Alors oui, mais on était en plein deuxième confinement et j’étais coincée avec lui en Normandie.
Est-ce que j’aurais dû partir quand il m’avait encore plus longuement sermonnée sur le fait que j’étais « trop discrète dans sa famille, que je ne posais pas de questions à sa sœur et qu’on dirait que je m’intéressais pas aux gens » ? Certainement, mais j’ai préféré pleurer toute la nuit à la place et tailler à la serpe dans mon estime de moi.
Est-ce que j’aurais dû partir quand il m’avait dit d’acheter des lentilles car il me préférait sans mes lunettes ? Quand il m’avait demandé pourquoi je me maquillais pas pendant ce 1er confinement et expliqué qu’il me trouvait super belle maquillée, ça me rajoutait un truc ? Ou encore quand il m’avait dit que je pourrais m’habiller de manière plus féminine quand même, arrêter avec mes Dr. Martens de festival et porter des talons car ça me donnerait plus d’allure ? Sans doute, mais ça m’avait paru tellement anecdotique par rapport à tout le reste de la relation.
Est-ce que j’aurais dû partir au tout début quand lors d’un de nos premiers dates, il m’avait dit que j’avais une démarche bizarre et m’avait conseillé de m’inscrire à la danse pour corriger ça ? Mais oui ! C’est là que j’aurais dû repérer ce foutu Red Flag qui criait « alerte ! alerte ! » et intervenir.
Le pire dans cette histoire, c’est que pour lui, cela partait d’une bonne intention, ce n’était pas malveillant. Il se disait juste que c’était pour mon bien, comme ça je lui plairais encore plus, c’était pas grand-chose de corriger ces mini trucs car il me le demandait. Alors il continuait d’argumenter, jusqu’à m’user et à ce que je m’énerve.
C’était 10% de la relation, à peine. Cela parait rien 10% au milieu de 90% géniaux. Mais c’est suffisant pour abimer et détruire les liens. Ça nous a empêché des deux côtés d’y aller franco, à 100% dans cette histoire. Ces 10% me faisaient péter un câble à chaque fois, à l’envoyer bouler violement. Lui il ne comprenait pas pourquoi et comment je pouvais à ce point partir en toupie, et m’a dit que cette façon de réagir à ce qu’il me disait, que cette colère elle était « destructrice ». Il m’a avoué que ces colères lui faisaient peur, que mon intransigeance l’empêchait d’être totalement à fond dans notre histoire.
J’ai compris depuis le rôle protecteur de ma colère. Quand on a ce sentiment qui gratte, ce truc désagréable qui monte et explose, c’est pas qu’on est dingue, c’est pas qu’on est trop sensible ou ingérable. C’est juste qu’une limite a été franchie. Ma colère, c’est la partie de moi qui veut me protéger, c’est la partie de moi qui m’aime. Elle a de l’estime pour ce que je suis, mes choix, mes goûts ! Elle ne tolère pas qu’on essaie de me contrôler, car « mon bien » il n’y a que moi qui peut le déterminer. Aimer, c’est pas contrôler.
Aujourd’hui, je ne veux plus jamais qu’on essaie de me contrôler, je ne veux même pas rentrer dans ce genre de négociation à base de « mais c’est mon avis, j’ai le droit de le donner si je pense que c’est pour ton bien, non ? ». Chacun ses limites, les miennes sont là.
Alors l’apprentissage, ce sera de les repérer, ces Red Flags, d’écouter ma colère avant même qu’elle n’émerge.
Tout est ouvert en ce moment, je ne sais pas ce que mon avenir amoureux me réserve, mais je sais juste que la prochaine fois qu’on essaiera de me contrôler, d’essayer de me changer sans me demander mon avis, même à la marge, même dans une infime tentative sur un truc sans importance : ce sera non. Pas « mais vas te faire foutre », pas d’énervement, de cris ou de pleurs, ce sera juste non. Et un truc de ce genre :
« Non. Tu n’essaies même pas. Ton job c’est la douceur et le plaisir. C’est les conversations passionnantes et les fous rire mémorables. C’est m’acheter un pain au chocolat le matin, et choisir le film du soir quand je ne vais pas bien. Moi, je vais faire tout mon possible pour t’offrir exactement ça pendant le temps qu’on a toi et moi. Puis, si on réussit ça, peut-être qu’on aura envie de construire ensemble quelque chose d’incroyablement solide. Alors, est-ce que tu en es capable ? »